Notre vie quotidienne se nourrit de mythes : le catch, le striptease, l'auto, la publicité, le tourisme... qui bientôt nous débordent. Isolés de l'actualité qui les fait naître, ils apparaissent soudainement pour ce qu'ils sont : l'idéologie de la culture de masse moderne. Le mythologue Roland Barthes les décrypte ici avec le souci - formulé dans l'essai sur le mythe aujourd'hui qui clôt l'ouvrage - de réconcilier le réel et les hommes, la description et l'explication, l'objet et le savoir.
" Nous voguons sans cesse entre l'objet et sa démystification, impuissants à rendre sa totalité : car si nous pénétrons l'objet, nous le libérons mais nous le détruisons ; et si nous lui laissons son poids, nous le respectons, mais nous le restituons encore mystifié. " Roland Barthes
En renversant l'image de la femme comme être inférieur par nature pour l'appliquer à l'homme, l'autrice démonte la mécanique de la domination masculine.
Un pamphlet littéraire et politique, où l'humour et la provocation révèlent les rapports de force entre les sexes. Depuis sa diffusion dans les rues de New York par Valerie Solanas en 1967, SCUM Manifesto est devenu un texte culte du féminisme.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Emmanuèle de Lesseps Postface de Lauren Bastide
Dans cet essai désormais classique pour les recherches féministes, les études genre, les études gaies et lesbiennes, et fondateur de la théorie queer, Judith Butler cherche à identifier les tactiques, locales, pour subvertir l'hétérosexualité obligatoire en exploitant les failles de ce régime politique. En jetant le trouble dans nos catégories fondamentales de pensée et d'action, elle explore une voie nouvelle où la subversion des normes hétérosexuelles peut devenir une façon de dénaturaliser ces mêmes normes, de résister au pouvoir pour, finalement, ouvrir le champ des vies possibles.
Parmi les livres les plus appréciés et les plus lus de bell hooks, À propos d'amour est un texte singulier. Avec sa perspicacité habituelle et ses talents de vulgarisatrice, l'autrice afroféministe s'y attaque à une thématique rarement abordée de front en théorie politique. Définissant l'amour comme un acte et non comme un sentiment, bell hooks démonte tous les obstacles que la culture patriarcale oppose à des relations d'amour saines, et envisage un art d'aimer qui ne se résume pas au frisson de l'attraction ou à la simple tendresse. Recourant à la philosophie morale comme à la psychologie, elle s'en prend au cynisme narquois qui entoure les discussions au sujet de l'amour, et s'attache à redonner toute sa noblesse à la possibilité de l'amour, dans une perspective féministe.
En 1978, Monique Wittig clôt sa conférence sur « La Pensée straight » par ces mots : « Les lesbiennes ne sont pas des femmes. » L'onde de choc provoquée par cet énoncé n'en finit pas de se faire ressentir, aujourd'hui encore, dans la théorie féministe et au-delà. En analysant l'aspect fondateur de la « naturalité » supposée de l'hétérosexualité au sein de nos structures de pensées, que ce soit par exemple dans l'anthropologie structurale ou la psychanalyse, Monique Wittig met au jour le fait que l'hétérosexualité n'est ni naturelle, ni un donné : l'hétérosexualité est un régime politique. Il importe donc, pour instaurer la lutte des « classes », de dépasser les catégories « hommes »/ « femmes », catégories normatives et aliénantes. Dans ces conditions, le fait d'être lesbienne, c'est-à-dire hors-la-loi de la structure hétérosexuelle, aussi bien sociale que conceptuelle, est comme une brèche, une fissure permettant enfin de penser ce qui est « toujours déjà là ».
Face aux désastres entraînés par l'anthropocène et le capitalocène, il y a urgence à penser et agir différemment. C'est ce qu'Haraway propose de faire dans Vivre avec le trouble, en racontant d'autres histoires, en renouvelant notre rapport au temps et aux autres espèces.
Prenant ses distances avec toute forme de futurisme (du salut technologique aux discours apocalyptiques) elle explore ces temps troublants et troublés que nous vivons afin d'y déceler les possibles qu'ils recèlent. Épaissir le présent, favoriser l'épanouissement multispécifique, générer des alliances improbables et des « parentèles dépareillées » pour ne pas céder à l'effroi ou l'indifférence, voilà ce à quoi nous invite ce livre.
Notre capacité à relever le défi climatique et à promouvoir plus de justice envers les autres, y compris envers les animaux, suppose un remaniement profond de nos représentations sur la place de l'humain dans la nature. Dès que nous prenons au sérieux notre vulnérabilité et notre dépendance à l'égard des écosystèmes, nous comprenons que notre habitation de la Terre est toujours une cohabitation avec les autres. Ainsi, l'écologie, la cause animale et le respect dû aux personnes vulnérables ne peuvent être séparés. De plus, la conscience du lien qui nous unit aux autres vivants fait naître en nous le désir de réparer le monde et de transmettre une planète habitable. C'est à cette éthique qui n'a rien à voir avec des injonctions moralisatrices et culpabilisantes que ce recueil ouvre la voie. Deux textes inédits
Passage en poche de cet essai paru en 2018 dans lequel Cy Lecerf Maulpoix, journaliste engagé dans les luttes LGBTQI et dans les luttes pour la justice climatique, nous plonge dans les courants de pensées socialistes anglais du XIXe siècle et part à la recherche d'une histoire ignorée, celle des espaces, lieux et communautés dans lesquelles ont été expérimentées des modes de vies minoritaires qui sont autant de ressources pour aujourd'hui, où la question des minorités, notamment sexuelles, peine à être intégrée dans les mouvements écologiques.
Tout ce que le XIXe siècle a produit est aux yeux de Walter Benjamin fantasmagorie. Que ce soient les passages qui émaillent le tissu urbain parisien, émanations de la construction en fer, ou les expositions universelles et leurs étalages de marchandises. L'illusionnisme de ce siècle a son champion en la personne du baron Haussmann, et son satiriste le plus zélé en celle de Grandville, transformant tout être humain en objet fantoche. Benjamin décrit comment ce siècle fut pétri de forces contraires, révolution contre conservatisme, bourgeoisie contre milieu ouvrier. La course à la nouveauté, propre de la modernité, se retrouve ritualisée dans la mode. Paris, ville-lumière dont Benjamin dénonce le ballet des illusions, entre oppression et promesse.
Ellen Willis, militante féministe au sein du groupe New York Radical Women, a marqué l'histoire américaine de la révolution sexuelle et de la critique contre-culturelle. Sa maitrise remarquable de la forme de l'essai, son point de vue à la fois radical et subtil nous paraissent incontournables, et précieux à partager dans le cadre des luttes actuelles sur la maternité, la prostitution, le travail, le sens du militantisme, les liens entre valeurs politiques et liberté d'expression, ou entre politique nationale et politique des corps.
La prose d'Ellen Willis témoigne d'une nécessité d'expression et d'un style qui mêle intime et politique, innervée par son goût du rock et du punk, et ses expériences militantes collectives.
Après le succès du Réalisme capitaliste, la traduction de Ghosts of My Life va définitivement imposer Mark Fisher (alias k-punk, 1968-2017) comme un auteur incontournable dans le domaine de la critique sociale et culturelle. En effet, à partir de l'évocation de figures musicales - Joy Division, Burial, etc. - littéraires - David Peace, John Le Carré, Sebald - ou cinématographiques - Christopher Nolan notamment -, Fisher explore différentes visions de futurs perdus et leur présence spectrale (Derrida) au sein de la culture contemporaine. Une manière de relier critique sociale, évocation de la pop culture mais aussi expérience intime.
Quarante années de théories féministes anglo-américaines en histoire de l'art, des écrits de Lucy Lippard aux problématiques spécifiques aux artistes afro-américaines, aux développements postféministes et aux questions queer, en passant par les approches marxistes de la production artistique.
Première traduction française de l'autobiographie-manifeste de Judy Chicago, artiste américaine iconique et pionnière du mouvement féministe en art aux États-Unis, parue en 1975.
Through the Flower a été mon premier livre (depuis, j'en ai publié neuf autres). J'ai été encouragée à l'écrire par l'auteure et diariste Anaïs Nin, qui a été mon mentor au début des années 1970. Lorsque j'ai écrit cette autobiographie, je l'ai pensée comme un genre de guide d'introduction pour les jeunes femmes artistes, susceptible de les aider dans leur développement. En retraçant mon propre combat, j'espérais leur épargner l'inexorable tourment de « réinventer l'eau chaude », car mes études sur l'histoire des femmes m'ont appris que c'est ce que font les femmes, toujours et encore, en particulier car nous n'avons pas accès aux expériences et aux avancées de nos prédécesseurs féminines - une conséquence du fait que nous continuons d'apprendre l'histoire de l'art et l'histoire tout court, sous un angle de vision masculin, intégrant trop peu les réussites de personnalités féminines.
Je dois reconnaître que lorsque je relis Through the Flower, je tressaille devant tant d'honnêteté sans fard ; mais en même temps, je suis heureuse que mon jeune « moi » ait eu le courage de parler avec une telle franchise de ma vie et de mon travail. Je doute être capable, aujourd'hui, de réanimer la candeur qui imprègne ce livre et reflète une confiance absolue dans l'accueil que le monde réserverait à des révélations si dénuées de conscience de soi. Et pourtant, c'est précisément cela qui donne son atmosphère particulière au livre, l'atmosphère des années 1970, où nous étions si nombreuses et nombreux à croire que nous pourrions changer le monde, dans le bon sens, un objectif qui a été - comme a dit l'une de mes amies - « violenté par la réalité ». Cependant, un espoir exagérément idéaliste d'améliorer le monde vaut mieux que l'acceptation cynique du statu quo. Au moins, avons-nous essayé - et je continue d'essayer. Peutêtre suis-je de toute façon trop vieille, désormais, pour changer.
Judy Chicago
La signification que les individus donnent aux choses repose nécessairement sur les transactions et les motivations humaines, et plus particulièrement sur la façon dont ces choses circulent et dont on en fait usage. Grâce aux essais de spécialistes en anthropologie sociale et d'historiens, ce livre construit un pont entre l'histoire sociale, l'anthropologie culturelle et l'économie et marque une étape majeure dans notre compréhension des fondements culturels de la vie économique et de la sociologie de la culture. Il trouvera un écho chez les anthropologues, les historiens des sociétés, les économistes, les archéologues et les historiens de l'art.
Les contributeurs de cet ouvrage examinent comment les choses sont vendues et échangées au sein de divers environnements culturels, passés et présents. En se concentrant sur des aspects de l'échange culturellement définis et des processus de circulation socialement régulés, les essais de ce livre visent à mettre au jour les façons dont les individus trouvent de la valeur dans les choses et dont ces dernières donnent de la valeur aux relations sociales. En envisageant les choses comme dotées d'une vie sociale, les auteurs nous livrent une nouvelle façon de comprendre comment la valeur est extériorisée et recherchée. Ils évoquent un grand éventail de biens - des tapis orientaux aux reliques sacrés - afin de démontrer que la logique sous-jacente à la vie économique quotidienne n'est pas si éloignée des principes de la circulation des objets exotiques et que la distinction entre les économies contemporaines et les économies plus distantes moins complexes est moins marquée qu'on ne le croit. Comme l'écrit Arjun Appadurai dans son introduction, derrière l'apparente infinité des besoins humains et la multiplicité des formes matérielles se cachent en réalité des mécanismes sociaux et politiques complexes, mais spécifiques, qui régulent les goûts, les échanges et le désir.