« Voyez alors notre vieille. Elle passe les deux mains le long de la cicatrice, elle tâte : ça y est, elle a compris. Plaf ! le pied lui échappe des mains. Vlan ! c'est la jambe qui tombe dans la bassine ! Boum ! le bruit du bronze ! Et la voilà qui part à la renverse : et toute l'eau par terre ! Oh ! le plaisir, la douleur en même temps qui l'envahissent ! Ses deux yeux soudain pleins de larmes, sa voix chaude qui s'étrangle ! ».
L'Odyssée, chant XIX, vers 467-472.
Derrière tout grand roman, tout grand film, toute époque, aussi, et surtout la nôtre, il y a l'Odyssée. Alors, pour mieux voir, au cinéma de l'Aveugle Homère, les mésaventures du plus célèbre vagabond de la littérature, il faut peut-être mieux entendre, en français d'aujourd'hui, les mille bruits que fait la vieille langue grecque. C'est l'expérience de « vision vocale » que tente, dans la présente « version française », l'helléniste, récitant et musicien, Emmanuel Lascoux.
Ces dix-huit nouvelles correspondent pour la plupart à une veine que les romans de Dennis Cooper illustrent moins évidemment (à l'exception peut-être de Salopes), celle de l'humour.
En effet, du célèbre Jerk, adapté par Gisèle Vienne, créé au Festival d'Avignon en 2008, et qui n'a cessé depuis de tourner en France et dans le monde entier, au très étonnant et très irrésistible Le directeur littéraire qui faisait une fixation sur le stade anal, tous ces textes - à l'exception de Le Pire qui reprend sous une forme plus contractée Violence, faits divers, littérature, font une belle part au recul ironique voire grotesque, à une forme de distanciation nouvelle. Ainsi les thèmes récurrents de Dennis Cooper : drogue, autodestruction, sadomasochisme, pulsion meurtrière, etc., sont-ils mis en perspective et, en quelque sorte, interrogés. Ils n'en sont pas pour autant amoindris. Au contraire, tout se passe comme si la mise en demeure que provoque cette forme inhabi! tuelle de comique, renforçait auprès du lecteur leur pouvoir de suggestion et d'angoisse.